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Vœu d’Abdoul Karim Sango pour 2015 : Stop à la dérive ethniciste !

Dans quelques heures, l’année 2014 prendra fin ! Vive 2015 avec ses nombreuses craintes, mais aussi ses nombreux espoirs. Comme de coutume, en début de ce nouvel an je voudrais formuler à l’ensemble de mes amis ici et partout ailleurs dans le monde mes vœux de santé, d’amour et de paix !

 

 

Le nouvel an est aussi un moment de profonde introspection sur notre contribution à la bonne marche de notre pays et du monde. Le 2 janvier 2014, dans mon message de nouvel an que je vous adressais, je formulais le vœu que la sagesse habite le cœur de chaque Burkinabè afin que l’article 37 ne fasse pas l’objet d’une quelconque modification. Au cours de toute l’année dans mes nombreuses interventions publiques j’ai continué d’insister pour indiquer que le peuple n’accepterait pas une telle forfaiture.

Hélas, frappé d’autisme le pouvoir de la quatrième République a méprisé ces nombreuses mises en garde en se tirant lui-même une balle dans les pieds par l’adoption de son funeste projet de loi constitutionnelle du 21 octobre 2014 portant modification de l’article 37. Il s’en est suivi une révolution démocratique entraînant la démission forcée et la fuite de Blaise Compaoré.

Alors que les Burkinabè s’attendaient légitimement à fermer la parenthèse du pouvoir militaire, l’armée en complicité avec une partie de la société politique et civile s’est emparée d’une partie du pouvoir en prenant l’engagement ferme de transmettre tout le pouvoir au plus tard en novembre 2015 à un régime civil démocratiquement élu. Si la nomination du lieutenant colonel Zida comme premier ministre s’est faite conformément à la charte de la transition, il faut indiquer que cette situation a tout de même dénaturé la révolution démocratique des 30 et 31 octobre 2014. Certains analystes ont même parlé d’un coup d’Etat opéré contre le mouvement démocratique.

Le vin est tiré il faut le boire. Faut-il cependant le boire jusqu’à la lie ? Je ne le crois pas et le peuple burkinabè autrefois qualifié par le Pr Bado Laurent de « peuple mouton » ne l’acceptera pas. On note que le peuple burkinabè est en phase de construction d’une démocratie authentique qui ne lui est pas imposée du dehors. Il nous appartient de maintenir allumé cette flamme de l’espoir d’une démocratie authentique par nos critiques objectives et constructives des organes de la transition. Ce qui s’apparente actuellement à de l’anarchie n’est rien d’autre que les manifestations visibles d’un peuple épris profondément des valeurs de justice sociale, d’égalité, de liberté et d’éthique. L’éthique, il faut qu’on en parle. C’est cette valeur qui donne sens à la République. Depuis Platon en passant par Montesquieu, il est clairement établi chez tous les grands auteurs que seuls les vertueux doivent diriger la République. Dès lors, l’on peut comprendre pourquoi les lois des grandes démocraties sont rédigées pour limiter autant que possible l’exercice d’un mandat public par des personnalités de mauvaise ou de moralité douteuse.

Le chef du gouvernement doit se donner les moyens de démettre son ministre Moumini Dieguemde. Les dernières explications de celui-ci ont fini par convaincre l’opinion qu’il n’a pas sa place dans ce gouvernement issu de la révolution démocratique. Les lois sont faites pour être respectées et les dirigeants doivent être les premiers à donner l’exemple. La vertu occupe une place centrale dans la culture de l’Afrique traditionnelle. Les rites d’initiations pratiquées dans de nombreuses sociétés servent à enseigner les valeurs de courage, de partage, de solidarité et d’honnêteté. Il nous faut construire l’Afrique et le Burkina nouveau autour de ces valeurs. En la matière, il ne faut pas se permettre de transiger. Soundjata Kéita, l’empereur du mandingue fut un homme de très grande vertu ; plus proche de nous, Mandela célébré par le monde entier en fut un aussi. Selon le Professeur Joseph Ki zerbo une élite dirigeante qui ne transcende pas le commun des gens au point de vue juridique mais aussi au plan éthique et moral n’a aucune légitimité et ne mérite pas la dénomination d’élite.

Un des grands défis qui se présentera à nous en 2015 ici au Burkina comme partout ailleurs en Afrique sera notre rapport à la morale et à l’éthique. Les Burkinabè auront l’unique occasion depuis le renouveau démocratique de voter en leur âme et conscience. Désormais, il faut opérer des choix électoraux sur des bases plus objectives que celles qui ont prévalu sous le régime défunt. Par quels moyens accroître les richesses nationales ? Par quels moyens répartir équitablement ses richesses ? Comment résoudre le chômage des jeunes ? Quelle place la famille et les enfants doivent-ils occuper dans notre société de demain ? Ce sont là autant de question autour desquelles les hommes politiques doivent faire preuve d’innovation et d’audace au lieu de nous servir des lieux communs.

Nous devons éviter au maximum d’instrumentaliser les ethnies et la religion dans le cadre des campagnes à venir. En effet, on ne peut pas avoir critiqué la théorie ivoiritaire du régime Gbagbo, on ne peut pas manifester de l’admiration pour le choix d’un noir américain pour diriger les Etats Unis et développer un argumentaire ethniciste ici au Burkina. Ceux qui ont chassé Blaise n’avaient pas d’ethnie ni de religion, ils étaient simplement des Burkinabé ou des africains. Il faut garder cette dynamique que nous envient de nombreux pays africains. Dans un monde devenu un village planéraire il est totalement absurde d’envisager le progrès économique et social sur la base de considérations ethniques, régionales ou raciales. Il faut dénoncer systématiquement toutes les personnes qui tiennent des propos ethnicistes en vue de les faire comparaître devant les juridictions pénales.

arton62575.jpg http://www.lefaso.net/spip.php?article62575



02/01/2015
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