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Régime de Transition : Un furieux affolement d’Etat

Dans le Faso actuel, la norme supérieure n’abroge plus la norme inférieure. La cacophonie messagère au sein de l’Exécutif en dit long sur l’effritement de l’autorité de l’Etat. Qui du Président du Faso de Transition, du Premier ministre ou du ministre de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et de la Sécurité, tient vraiment les rênes de ce premier pouvoir ? Un déni de hiérarchie se laisse furieusement apercevoir.

 

 

Régime de Transition : Un furieux affolement d’EtatLes sorties respectives et successives de Yacouba Isaac Zida et Auguste Denise Barry témoignent de ce méli-mélo au sommet de l’Etat. Avec la même teneur, leurs déclarations viennent, à la fois, créer la psychose au sein de la population et jeter l’huile sur le feu. Les trompettes embouchées émettent les mêmes sons : gare à toute personne qui oserait troubler l’ordre public ou porter atteinte à la sureté de l’Etat. D’un côté, les libertés individuelles et collectives sont remises en cause. De l’autre, les droits civiques et politiques sont reniés. La gouvernance patauge. L’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 s’écarte, peu à peu, de ses objectifs premiers à tel point que sa finalité risque d’être un leurre.

Les déclarations de l’Exécutif ne rassurent guère. Elles laissent planer le doute. Selon un dicton de la Police, l’autorité ne se mesure pas à la taille de la ceinture. Ce ne sont ni les déclarations ni les menaces qui vont restaurer l’autorité de l’Etat. Sans fanfare ni tambour, les responsables de la Transition gagneraient à œuvrer au rétablissement de la confiance entre elles et les différentes composantes de la population. Il s’agit, pour elles, de se montrer capables de susciter l’espoir tant attendu et de tourner, une fois pour toute, la page Blaise Compaoré et consorts.

Au moment où la Nation a besoin de tous ses fils et filles pour se reconstituer, l’on commence à voir partout des démons ou des ennemis. Comme sous la période trouble de la Révolution du 4-Août. Il est certain que des responsables du régime déchu ne vont pas facilement accepter leur défaite et abdiquer de sitôt. Des initiatives subversives ne sont pas à écarter. Mais, en toute chose, il faut savoir raison garder lorsque l’on conduit le destin d’une Nation.

Un Etat bien organisé avec des dirigeants bien responsables ne cèdent pas à la panique de façon lapidaire comme celle qui est donnée à voir ces jours-ci. Le langage ésotérique employé au haut lieu donne l’impression que le pays est en train d’être envahi par des démons que seuls des initiés peuvent distinguer. L’illusion et l’allusion ne sont pas des armes communicationnelles probantes. Quand on est aux affaires à une période aussi fragile que celle d’une Transition, il faut savoir prendre la parole à un moment vraiment opportun et réellement nécessaire. Des moyens et des instruments légaux et républicains sont disponibles pour contrecarrer toutes velléités inhibitrices de l’œuvre de reconstruction nationale.

La posture adoptée actuellement par le Chef du Gouvernement, Yacouba Isaac Zida et de son ministre en charge de l’Administration territoriale et de la Sécurité, Auguste Denise Barry, s’avère du « Deux poids, deux mesures ». A force de taire, à dessein, certaines manifestations, le Gouvernement a contribué à forger le terreau dans lequel se cachent aujourd’hui les menaces avérées ou supposées sur sa survie. C’est avec sa bénédiction que des OSC et des partis politiques ont été dépoussiérés ou ont pu retrouver un souffle nouveau pour soutenir ceci ou cela en sa faveur. Il faut être si naïf pour ne pas se rendre compte de la collusion déclarative entre le Gouvernement et ses suppôts. La déclaration du ministre de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et de la Sécurité n’a été qu’une onction d’Etat de celle de la prétendue porte-parole d’une coalition d’OSC, en la personne de la tonitruante Safiatou Lopez Zongo.

 

Maladroitement médiatisée juste après l’intervention du Conseiller technique Naba Ouédraogo, cette mise en garde est un amalgame qui confirme un double jeu. Beaucoup se sont étonnés de la grande audience accordée sur la télévision publique à Mme Lopez et à ses camarades qui sont loin d’être neutres dans leurs propos. La rue s’est bien substituée aux services régaliens de l’Etat.

Pourtant, la fermeté que l’Exécutif feint aujourd’hui d’user doit être unanime à tous les niveaux et pour tous. L’autorité de l’Etat aurait dû être assise dès les premières heures de la mise en place des organes de la Transition. La fin de la recréation a été sonnée beaucoup plus tard au moment où des acteurs de tout bord se sont arrogé le droit de s’immiscer dans la gestion des affaires de l’Etat. Celle-ci ne peut être une réalité à court terme d’autant que le nouveau régime semble s’essouffler devant ses ambitions démagogiques et populistes. Il aurait fallu mettre tout le monde au pas dès le début et œuvrer de façon impersonnelle à la satisfaction des aspirations profondes qui ont conduit au changement brusque et brutal après vingt-sept (27) ans de dirigisme.

Des ficelles peuvent être tirées çà et là mais force est de reconnaitre que les mêmes causes pourraient malheureusement entrainer encore les mêmes effets. Après avoir usé de toutes leurs forces pour contribuer à la mise en place d’un régime de transition, nombreux sont les Burkinabè qui se sentent aujourd’hui trahis dans leur combat d’étancher leur soif et de trouver une solution durable à leur faim. Au-delà de la coalition contre la modification de l’article 37 de la Constitution, il ne faut pas perdre de vue que la mobilisation générale du peuple burkinabè, les 30 et 31 octobre 2014, tient, en premier lieu, à sa volonté d’imposer plus de bien-être, plus de liberté, plus d’égalité et d’équité dans le partage des richesses nationales.

Que les autorités de la Transition souffrent alors qu’une partie de la population adhère à leurs actions et qu’une autre n’y trouve pas son compte. Si cette dynamique dans la vie d’un pays est bien encadrée, elle devient le baromètre de la vitalité démocratique que tout Burkinabè appelle de son vœu. La même population mature, qui a pris son destin en main en récusant la forfaiture du 30 octobre 2014, peut se montrer assez lucide au moment des échéances électorales pour écarter les « gigolos politiques » et les « loups à la peau d’agneau ».

Quand des dirigeants d’un pays se mettent à parler de façon voilée en usant de supputations comme leurs compatriotes en raffolent dans les cabarets, les bars ou les marchés, l’heure n’est vraiment pas à la sérénité. La République a des lois. Tout(e) citoyen(ne) qui se met en marge de la légalité se verrait alors appliquer la force publique. C’est une logique qui se passe de tout commentaire dans un pays bien administré, bien gouverné et bien dirigé. Toute autre démarche illustre une panique qui ne rassure pas sur des lendemains meilleurs.

Après l’insurrection populaire, un diagnostic sans complaisance de la situation nationale s’impose afin de tirer les leçons des graines de la division sans précédent des Burkinabè. S’il est vrai que les artisans de la déconfiture démocratique burkinabè doivent impérativement être mis hors jeu, il faut se rendre à l’évidence que toute exclusion mal appréhendée peut être une autre source de chaos. Il n’est pas exclu que des chancelleries considèrent aujourd’hui le Burkina Faso comme « n’étant plus un pays sûr ou fréquentable ». Face à une économie nationale tenaillée de toute part, les bailleurs de fonds et autres investisseurs attendent de voir plus clair. Les aspects sécuritaires ne sont pas également au beau fixe et pourraient profiter à des excursions terroristes comme cela a été le cas le samedi 4 avril dernier avec l’enlèvement d’un expatrié de la mine de manganèse de Tambao.

A l’épreuve de l’exercice du pouvoir d’Etat, un certain amateurisme caractérise les actions entreprises çà et là à tel point qu’un conseiller spécial du Chef du Gouvernement, Abdoulaye Soma, guidé par un « m’as-tu vu » ( ?), n’a pas hésité à enfoncer le clou là où il était de son devoir d’aider à l’enlever. Son attitude pose le problème même de la sincérité des personnalités dites de haut niveau coptées pour éclairer la lanterne des autorités de la Transition. Soit, il fait partie de ses conseillers qui ne voient pas celui qu’ils doivent conseiller d’autant qu’il lui revenait, en premier de vider ses « trippes juridiques » devant le Premier ministre que de les verser sur la place publique. Soit il a préféré se « déconstiper » intellectuellement comme s’adonne, à l’heure actuelle, une race d’universitaires au lieu d’aider le pays à avancer.

http://www.lefaso.net/spip.php?article64068



10/04/2015
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